Après deux éditions laborieuses mais porteuses d’espoir, le championnat de première división Elite One passe un cap avec la saison à venir. Un défi important est à relever pour les organisateurs, celui de la compétitivité et de l’attractivité.
C’est une lapalissade que de dire que le championnat camerounais a depuis fort longtemps perdu tout son attrait. Le temps des grands noms que sont Canon, Tonnerre de Yaoundé, Union de Douala, Coton Sport de Garoua, qui remplissaient les stades de la république à chaque sortie est révolu. On compte désormais sur le bout des doigts, les matches qui affichent plus de 3.000 spectateurs dans les stades. Même pas Bamboutos de Mbouda et son million de supporter n’arrive aujourd’hui à remplir les gradins des arènes au Cameroun. Résultats des courses, c’est désormais dans les stades annexes ou les stades d’entrainement aux capacités réduites que se disputent les matches de championnat. Des stades aux capacités d’accueil réduites mais qui peinent à se remplir malgré le pédigrée parfois affiché par les équipes en compétition.
Les habitués u stade annexe de l’Omnisports de Mfandena peuvent témoigner du nombre defois où cette arène de 1.000 places assises a pu faire le plein d’œuf. Idem pour le stade de Ngoa Ekelle et des quelques 2.500 places qui fait le plein à quelques rares occasions comme les matches de Bamboutos ou de Coton Sport. Il est d’ailleurs arrivé que la Fecafoot y soit pour beaucoup dans le remplissage du stade en décrétant parfois la gratuité de l’accès. « Payer 2.000 Fcfa pour venir regarder un spectacle de piètre qualité n’est pas encourageant », lancent certains fans du football, agacés par la qualité des acteurs.
Pourtant, le niveau affiché par le championnat est loin d’être ridicule. Certes, les meilleurs talents continuent de s’exporter vers de nouveaux el dorado comme la Tanzanie, la Zambie, les pays du Maghreb ou encore les championnats moins côtés d’Asie, mais où les perspectives salariales sont meilleures. Il n’en demeure pas moins que l’Elite One est un spectacle intéressant avec des duels intenses et des matches riches en suspense.
Un problème marketing
On ne le dira jamais assez, on a beau avoir le meilleur championnat au monde, tant qu’il n’est pas bien vendu, il restera sous-côté. C’est le cas du Cameroun. Si l’arivée de Samuel Eto’o à la tête de la Fecafoot a consacré une légère embellie avec de nouveaux sponsors qui sont entrés dans le portefeuille de la Fecafoot et de l’Elite One, çà reste insuffisant ou alors peu lisible, et les montants versés loin des standards du marché actuel. Comment comprendre que le championnat tanzanien soit valorisé à 10Millions de Dollars, soit 6.5 Milliards de Fcfa en droits TV par an, et que l’Elite One peine à trouver acquereur pour des droits à hauteur ne serait-ce que d’un Milliard de Fcfa soit 1.5 Million de Dollars ? Comment comprendre que le naming du championnat camerounais n’atteigne pas le Milliards de Fcfa ? Les 600 Millions que versait déjà MTN à al Ligue de Football Professionnel n’ont pas évolué depuis 15 ans aujourd’hui, au contraire du marché qui lui, est plus structuré et attractif ?
Qui vend le championnat camerounais ? Qui a la charge de le rendre bankable auprès des potentiels mercenaires ? Dans le contexte actuel, difficile de ne rejeter le tord qu’à la Fecafoot qui se bat avec les moyens du bord. Il est important qu’une véritable synergie s’installe entre les annonceurs, les clubs et la Fédération afin de trouver une solution pérenne. L’intervention de l’Etat à travers le gouvernement ne serait pas de trop ^pour sortir de l’ornière. En offrant un cautionnement moral au championnat, il permettrait de le fiabiliser et de le rendre viable auprès des annonceurs.
La structuration des clubs.
On peut parler des heures durant des faiblesses de l’organisateur du championnat, mais si on ne relève pas celles des acteurs principaux, alors on reste superficiel. Comment peut-on souhaiter avoir un championnat professionnel avec des clubs amateurs ? c’est comme faire du neuf avec du très vieux, c’est impossible ! Lors de la création de la Ligue de Football Professionnel du Cameroun LFPC en 2012, un cahier de charges avait été adopté par les clubs et la ligue pour le passage effectif au professionnalisme. Outre le passage des équipes au statut d’entreprises à part entière, il y avait également la mise sur pied d’infrastructures professionnelles : stades d’entrainements, siège social, équipes jeunes etc… Plus de 10 ans après l’adoption de ce cahier de charges, force est de constater que peu de clubs ont mis en place les structures nécessaires.
Sur le plan marketing, les clubs peinent à exister et ont du mal à se trouver des sponsors à même de financer leurs activités. Conséquences, ils ne sont réduits qu’à attendre les subventions fédérales (qui ont certes doublé depuis deux ans) pour survivre. Seul Coton Sport de Garoua et dans une certaine mesure, le Canon de Yaoundé ont réussi à s’affranchir financièrement de cette subvention dont le paiement est de plus en plus hypothétique. Il n’y a qu’à regarder les budgets des équipes pour la saison à venir pour comprendre le gap. Plus de 600 Millions pour Coton Sport de Garoua, soit plus du double de la moyenne générale des autres clubs. Certains affichent d’ailleurs un budget de moins de 100 Millions pour la saison. Difficile dans ces conditions de ne pas se retrouver avec des clubs en déficit financier avant la fin de la saison.
Selon les chiffres, une journée coute en moyenne 4 Millions de Francs CFA à un club professionnel au Cameroun. Un budget qui intègre les primes d’entrainements, primes de match, le déplacement, le casse-croute de la mise au vert pour l’équipe. En cas de déplacement, le montant passe à environ 8 Millions pour les villes de Douala, Bafoussam, Limbe pour une équipe basée à Yaoundé. Avec un ration de 10 match à l’extérieur dans ces 04 villes pour un club en une saison, on se retrouve déjà à environ 80 Millions de Fcfa de dépenses. Si on y ajoute le double déplacement au Nord qui se chiffre à environ 10 Millions, on peut se retrouver avec environ 100 Millions de Fcfa hors salaire, rien que pour les déplacements. Ce qui fait passer une estimation budgétaire à près de 350 Millions pour un club moyen. Ajouté à ceci les salaires des joueurs, 200.000 Fcfa minimum par joueur, pour un effectif moyen de 30 joueurs dans l’équipe pro, on en vient à environ 72 Millions la saison pour les salaires. Ajoutons-y 28 Millions en primes diverses, on se retrouve facilement avec un budget de 450 Millions par club.
Comment trouver ce financement ? La question est dans tous les esprits des présidents de club en début de saison. Un vrai casse-tête chinois pour ces derniers, à l’affût du moindre sou pour renflouer leurs caisses. La vente de leurs meilleurs éléments n’est alors que la seule ressource dont ils disposent clairement, au vue de la petitesse des recettes de stades, du sponsoring et de la subvention. Pas surprenant donc de se retrouver avec des équipes en apnée avant la fin de la phase aller du championnat.
Dans ces conditions, il est plus qu’impératif pour les clubs de nouer des partenariats sûrs, d’accélérer la mise sur pied de rais équipes marketing comme ce fut le cas pour Coton Sport de Garoua. La trop grosse tendance aux entreprises unipersonnelles, qui ne reposent que sur les finances d’un seul individu ne sont pas pour favoriser la compétitivité du championnat et son attractivité.